Suite aux faits très alarmants au Rwanda, AFD International revient sur le cas de la politicienne de l’opposition Rwandaise Victoire INGABIRE condamnée le 29 octobre 2012 à 8 ans de prison par la Haute Cour de Justice Rwandaise en particulier, et celui de l’état des droits de l’homme au Rwanda en général. A ce titre, nous rappelons que depuis plusieurs années, le gouvernement néerlandais finance, à hauteur de 5 millions d’euros, la restructuration et la professionnalisation du système judiciaire et policier au Rwanda. Ladite aide a été d’être suspendue dernièrement [1].
Cette décision, que nous saluons, va dans la même lignée de celle de Royaume-Uni qui a annoncé, par le biais de son ministre en charge de l’Aide au développement, Justine Greening, la suspension de son aide d’une trentaine de millions d’euros aussi [2]. Ces suspensions ne font que confirmer le rapport des Nations unies, accusant Kigali de soutenir les rebelles dans l’Est de la République Démocratique du Congo et d’un abus des droits fondamentaux des individus plus qu’inquiétant, comme le relate (entre autre) l’organisation Human Rights Watch, dans un rapport daté du 4 juin 2012. Le Rwanda a fermement rejeté ces accusations, qualifiant le rapport de « profondément regrettable ».
En outre, AFD International constate que l’ensemble des structures pour lesquelles ont été destinées les aides suscitées, au lieu de servir et de profiter au peuple rwandais, elles sont devenues des outils de répression à la solde du pouvoir en place, lequel en fait usage pour consolider son emprise sur toute la vie sociale et politique, et pour réprimer toute opposition politique. Le cas de Madame Victoire IINGABIRE UMUHOZA est un exemple édifiant.
Il est à rappeler que Victoire INGABIRE, après avoir passé des années en exil aux Pays-Bas, a décidé de rentrer au Rwanda avec l’intention ferme de se présenter aux élections présidentielles Rwandaise de 2010 en sa qualité de Présidente des Forces Démocratiques Unifiées (FDU), parti politique légalement reconnu. Victoire INGABIRE a été arrêtée à son domicile de Kigali, le 14 octobre 2010 pour collaboration présumée avec une organisation terroriste, la contribution à la division de la population du Rwanda et la négation du génocide de 1994.
AFD International rappelle que l’implication du régime de Kigali dans les crimes qui ont endeuillé le Rwanda et l’Afrique Centrale est de plus en plus évidente (Mapping Rapport de l’ONU) [3]. Aujourd’hui, si en théorie la peine de mort est abolie, au Rwanda, elle est remplacée par l’emprisonnement en isolement, une pratique qu’AFD International condamne fermement avec l’ensemble des organisations internationales des droits de l’homme.
En outre, les conditions de détention dans les institutions pénitentiaires rwandaises sont interpellantes, certains détenus étant soumis systématiquement à des actes de torture. Le rapporteur des Nations Unies du Comité pour l’examen du rapport du Rwanda, M. Alessio Bruni a, de surcroit, relevé que si le nouveau Code pénal indique bien que la torture est un délit spécifique, il ne contient pas de définition de la torture. En outre, la peine minimale prévue pour acte de torture n’est que de six mois, alors que la torture est un crime grave.
La législation rwandaise parle de souffrance physique liée à un acte de torture, mais pas de souffrance mentale, a relevé le rapporteur. Celui-ci a précisé dans ses observations qu’Amnesty International avait fait état de 18 allégations de mauvais traitements ou actes de torture commis par des agents de l’État et de 45 cas de détention illégale allant de dix jours à deux ans dans des camps militaires ou des lieux de détention secrets entre 2010 à 2011.
AFD International déplore la passivité de l’Union Européenne vis-à-vis des autorités Rwandaises, exhorte l’ensemble des représentations de l’UE à Kigali à être plus proches des opprimés du régime, et à mieux informer leurs gouvernements respectifs ainsi que l’ensemble des acteurs de la société civile sur le terrain.
AFD International salue les autorités néerlandaises et du Royaume Uni pour avoir suspendu les aides octroyées aux Rwanda, souhaite que ces pays jouent un rôle actif dans le cadre de leurs accord d’aides et d’assistance judiciaire avec le Rwanda afin que Mme victoire Ingabire ainsi que l’ensemble des détenus d’opinion puissent bénéficier d’un procès équitable.
AFD International appelle les autorités rwandaises à revoir la sentence du tribunal et à ré-ouvrir le procès de Mme victoire Ingabire en lui permettant de bénéficier d’un procès équitable, sachant qu’AFD International ne prend pas position sur la question de la culpabilité ou l’innocence de l’ensemble des charges retenues contre elle.
AFD International appelle l’Union Européenne ainsi que les Nations Unis à revoir l’ensemble de leurs accords directs ou ceux de leurs Etats membres avec le Rwanda au regard de la situation inquiétante des droits de l’Homme dans ce pays, et des conventions internationales en matière des droits de l’homme ratifiés par ce dernier.
AFD International affirme qu’elle continuera à suivre de très près l’ensemble de la situation des droits de l’homme au Rwanda.
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AFD International
Département Afrique Subsaharienne
Bruxelles, Belgique
Contact : Africa@afdinternational.org
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[1] Suspension de l’aide humanitaire hollandaise au Rwanda